Vanessa Moungar a rejoint le groupe LVMH en 2021 en qualité de directrice diversité et inclusion. Au quotidien, cette ex du Forum économique mondial et de la Banque africaine de développement s’emploie à cultiver l’inclusion au sein d’un groupe qui compte aujourd’hui 175 000 collaborateurs à travers le monde. Pour têtu·connect, elle revient sur ses missions, ses convictions et ses engagements.
Par Chloé Consigny
Pouvez-vous nous expliquer la genèse de vos engagements ?
Je suis franco-tchadienne. Tchadienne par mon père et française par ma mère, j’ai grandi entre ces deux univers et j’ai très jeune pris conscience du fait qu’il existait des écarts dans le monde en termes d’égalité d’accès. Ma différence, je l’ai vécue comme une force et je pense que j’ai à cœur de transmettre cette conviction forte : les diversités sont source de richesse.
Quel a été votre parcours avant de rejoindre LVMH ?
J’ai travaillé pour différentes organisations. J’ai d’abord créé une structure de conseil à destination des entreprises sur les secteurs retail et distribution. En 2013, j’ai rejoint le World Economic Forum à Genève. Si cette organisation est d’abord connue pour son sommet annuel de Davos, le World Economic Forum travaille sur différentes thématiques. Mon scope était l’ensemble des questions relatives aux femmes et aux jeunes. Au-delà de mes responsabilités régionales sur l’Afrique, je travaillais sur les questions d’investissements et partenariats publics privés à l’égard des jeunes et des femmes au niveau global. Cinq années plus tard, j’ai rejoint la Banque africaine de développement en qualité de directrice du département genre, femmes et société civile. J’y pilotais tous les projets d’égalité femmes hommes avec un intérêt particulier pour les industries à forte participation féminine, comme la mode. C’est à cette occasion que j’ai rencontré le groupe LVMH.
Vous avez rejoint le groupe LVMH il y a un an, sur une direction nouvellement créée. Quelle a été la réflexion initiale à la création de ce poste ?
Le groupe LVMH est composé de 75 maisons. Il est présent dans 80 pays et totalisera bientôt quelques 200 000 collaborateurs à travers le monde. LVMH est donc par essence un groupe divers. Mon rôle est de coordonner les actions diversité et inclusion au sein des 75 maisons. Nous sommes engagés au travers de notre code de conduite qui stipule que la culture inclusive doit être valide dans toutes les maisons et chacun et chacune doit se sentir respecté·e. Néanmoins, nous n’optons pas pour une approche standardisée. Chaque maison décline son propre plan d’action en fonction de sa culture et de ses priorités et est dotée d’un ou d’une personne responsable du D&I avec qui je suis en lien. Notre vision est transversale au business et commence avec les talents. La stratégie diversité et inclusion infuse ensuite dans l’ensemble des métiers, depuis la création à la communication externe, en passant par le marketing. Finalement, mon équipe est très large et se compose de l’ensemble des collaborateurs et des collaboratrices du groupe.
Quelles sont les actions concrètes de LVMH en matière d’inclusion des personnes LGBTQI+ ?
Nous mettons en place des actions tout au long de l’année. Par exemple, à l’occasion de la journée de l’IDAHOT le 17 mai, nous nous sommes placés aux cotés de têtu·connect pour la réalisation du film de sensibilisation aux LGBTQI+phobies. En juin, nous avons lancé une grande campagne de communication interne baptisée « Voices of Inclusion – Pride Conversations ». Pour cette occasion, Antoni Porowski star de « Queer Eye » sur Netflix est allé à la rencontre des collaborateurs et collaboratrices du groupe afin de leur demander leur définition du terme allié·e.
Vous venez de signer la charte de l’Autre Cercle. Pourquoi maintenant ?
Nous signons cette semaine la charte de l’Autre Cercle. Chaque CEO de chacune de nos maisons y apposera sa signature. Si cet engagement nous permet de réaffirmer à tous nos collaborateurs sur le territoire français que nous sommes engagés pour une égalité de droit et de traitement pour tous, il faut bien avoir à l’esprit que la signature de la charte de l’Autre Cercle ne marque pas le début de mos engagements en faveur de la diversité et de l’inclusion. Dès 2019, le groupe a été signataire des normes de conduite des Nations-Unies. Finalement, nous préférons communiquer par la preuve, en donnant à voir à l’interne et à l’externe nos engagements.
Pour la création de son ERG (Employee Ressource Group) Pride, LVMH a fait appel à tetu·connect. De quelle façon la direction D&I travaille-t-elle avec l’ERG ?
Chez LVMH, le réseau Pride s’est d’abord structuré aux UK et aux Etats-Unis. Désormais ce réseau existe aussi en France. Ces réseaux qui peuvent prendre des formes différentes selon les régions du globe, sont de véritables plateformes de connexion pour les talents. Je travaille de près avec l’ERG All Pride de LVMH. Cependant, mon rôle n’est pas de leur dicter leurs actions, mais d’être à leur écoute et de leur fournir un accompagnement dans la réalisation de leurs projets. Le soutien est aussi un soutien financier qui permet à l’ERG de réaliser différentes actions, à l’instar de la newsletter interne.
Pouvez-vous d’ores et déjà mesurer les premières avancées permises par la présence de cet ERG auprès des différents collaborateurs et collaboratrices du groupe ?
Nous avons des metrics et des KPI clairs en matière de handicap ou encore de parité. Il est, en revanche beaucoup plus difficile de mesurer l’inclusion des personnes LGBTQI+, notamment en France où il n’est pas possible de tracer ces chiffres. Nous pouvons, en revanche, avoir accès à des sondages sur le ressenti de nos collaborateurs et collaboratrices. Dans ce contexte, le rôle de l’ERG Pride est indispensable. Par ailleurs, la présence de rôles modèles, c’est-à-dire de personnes visibles et notamment au sein du top management, est fondamentale. La communication interne est tout aussi importante, car c’est un vecteur de banalisation de ces sujets. Au quotidien, chacun de nos talents doit se sentir libre d’être qui il est.