« La difficulté n’est pas d’être créatif, c’est d’être juste », Agathe Bousquet, Présidente Publicis Groupe France 

« La difficulté n’est pas d’être créatif, c’est d’être juste », Agathe Bousquet, Présidente Publicis Groupe France 

Par Chloé Consigny

Ne lui donnez pas la maternité du Festival Solidays. Agathe Bousquet n’en est pas la cofondatrice. Elle a, tout au plus, « participé à la fondation de Solidarité Sida en 1992 et œuvré aux côtés de Luc Barruet pour faire émerger ce festival ». Un engagement de jeunesse qui marque profondément la carrière de celle qui, en 2017, accède à la présidence de Publicis Groupe en France. « À 19 ans et grâce au monde associatif, j’ai compris le pouvoir de la communication en mesurant l’impact d’une communication bien menée sur l’avancée des luttes ». Cinq années durant, elle travaille au sein de l’association Solidarité Sida et mesure l’étendue de l’intersectionnalité : « le SIDA agrège toutes les discriminations. Lorsque l’on s’engage dans cette lutte, on se retrouve au cœur de discriminations qui dépassent largement la cause gay ». 

Vivre la différence 

Elle rejoint ensuite Euro RSCG qui devient Havas Worldwide Paris et dont elle prend la direction générale en 2012. En 2017, elle est recrutée à la tête des opérations françaises de Publicis Groupe. Une entreprise « humaniste, fidèle aux valeurs défendues par son fondateur, Marcel Bleustein-Blanchet », explique-t-elle. Et d’ajouter : « lorsque je suis arrivée chez Publicis il y a sept ans, il y avait déjà de nombreuses actions menées en matière de diversité et d’inclusion. Aujourd’hui, nous devons accélérer nos engagements, notamment en faveur de la mixité sociale et générationnelle ».  Si elle reconnaît un manque de diversité au sein du top management, elle a bon espoir pour la suite : « le middle management est aujourd’hui beaucoup plus divers qu’auparavant. Nous aurons donc davantage de représentations diverses à l’avenir dans le top management ». Régulièrement, le groupe utilise son savoir-faire pour faire passer des messages à l’interne, à l’instar de la campagne « Ma plus grande fierté ». Cette exposition interne a mis en scène des collaborateurs et collaboratrices LGBTQI + et allié·es. « Lorsqu’un·e alternant·e LGBTQI+ intègre Publicis et voit cette campagne affichée au sein de nos bureaux, il ou elle ne peut que se sentir accueilli », explique-t-elle.

Pouvoir d’agir 

En vingt années, elle constate que la communication a beaucoup changé « parce que nos clients ont changé. Mais aussi parce que les réseaux sociaux ont permis aux marques d’être dans une interaction permanente avec leurs client·es ». Les campagnes stéréotypées, véhiculant une image d’arrière-garde de la société, subissent immédiatement la sanction des internautes. « Lorsqu’il y a un backlash, je constate que c’est rarement une agence qui est derrière. Aujourd’hui, tout le monde veut bien faire. Cependant, être créatif ne suffit pas, il faut que les campagnes correspondent à une réalité », poursuit la communicante. En interne, les métriques sont légion. « Nos chargés de projets s’appuient sur des études qui leur permettent de signaler à un client un brief qui comporte des risques de heurter des sensibilités ou encore de véhiculer des stéréotypes », explique-t-elle. C’est ainsi, par exemple, que sous le regard des experts de Publicis, la nouvelle campagne de Gilette a revisité l’ADN de la masculinité pour donner à voir les masculinités du 21e siècle dans leurs diversités. Autre fierté de la maison, la campagne SNCF « on n’est pas carré, on est hexagonal », avec un slam signé Gaël Faye et mettant en scène différents visages de la France. « Ce film a eu une résonance incroyable, car il apporte de la positivité. Et ça marche : lorsqu’on déjoue les stéréotypes en s’appuyant sur le réel, la performance est au rendez-vous », conclut-elle.