« J’ai toujours fait preuve d’une grande résilience », Rayan, conseiller de vente en produits cosmétiques

« J’ai toujours fait preuve d’une grande résilience », Rayan, conseiller de vente en produits cosmétiques

Accompagné par la Fondation Le Refuge, Rayan, 21 ans, commence sa vie active dans la vente de produits cosmétiques. Après un stage chez Kiehl’s, il raconte le chemin qui l’a mené vers la confiance et l’affirmation de soi.

Sous ses boucles brunes, Rayan laisse transparaître une personnalité solaire. Sa voix enthousiaste l’annonce d’emblée : « malgré tout ce que j’ai vécu, je suis toujours resté sociable et ouvert ».  Danseur, passionné de musique, le jeune homme a récemment mis à profit son engouement pour l’univers de la beauté dans des entreprises du secteur. Chez Kiehl’s, marque du groupe L’Oréal où il a récemment été accueilli pour un stage en vente, il confie avoir trouvé sa place ainsi que l’occasion de mettre en avant son expertise. « Je m’intéresse à la cosmétique depuis longtemps, expose-t-il. Je m’informe beaucoup, ma peau me sert un peu de prototype ».

Échapper aux LGBT-phobies

En dehors de sa vie professionnelle, qu’il démarre tout juste, Rayan a dû, comme d’autres jeunes LGBTQI+, apprendre à survivre. Son enfance est marquée par la violence et l’homophobie au sein de sa famille. « Je n’ai pas eu besoin d’attendre l’école pour faire face à des discriminations choquantes, raconte-t-il. Je n’ai pas été traumatisé par des agressions dans la rue ou au lycée parce que chez moi, c’était pire ». Longtemps donc, pour des raisons de sécurité, Rayan ne se revendique pas queer. « J’ai déjà pris le risque de me maquiller et de m’habiller comme je voulais, à mes risques et périls, précise-t-il. Mais je n’ai jamais fait de coming out nulle part car je n’en voyais pas l’utilité personnelle. Au lycée, où mon frère et ma sœur avaient des connaissances, ça aurait été dangereux ». 

À partir de 17 ans, il multiplie les séjours hors du foyer familial jusqu’à ce jour de février 2023 où, de retour chez ses parents, il se fait gravement agresser par son frère. Des amis viennent le chercher, il décide qu’il ne reviendra plus. « Mon père soutenait mon frère. Ma mère est la seule personne de ma famille qui m’a soutenu dans ces situations. C’est grâce à elle que je suis toujours vivant ». Quelques semaines plus tard, Rayan est accompagné par la Fondation Le Refuge, qui soutient des jeunes LGBTQI+ âgés de 14 à 25 ans. « Avec ce parcours, et la résilience que j’ai acquise très tôt, j’ai pu apprendre à sélectionner les milieux professionnels dans lesquels m’investir. J’ai eu la chance de développer cette force et de survivre à ma famille ».

Débuts professionnels stimulants

Ses premières expériences de travail s’avèrent salvatrices. Chez Kiehl’s, où il salue une équipe accueillante et un environnement de travail serein, il voit une « manière différente de servir la clientèle, un peu comme dans l’univers du luxe ». Le militantisme est une autre façon pour lui de s’exprimer hors de la sphère familiale. Le 5 mai 2024, il est dans la rue pour revendiquer les droits des personnes trans. Au travail, sa maturité, ses connaissances et son aisance relationnelle font leur effet. « J’aimerais réitérer l’expérience », commente-t-il simplement.

Pour des ressources humaines « vraiment humaines »

À moyen terme, Rayan se verrait bien continuer à exercer dans le monde des cosmétiques, si possible chez Kiehl’s. S’il estime ne pas avoir beaucoup de « réponses techniques » à apporter à la question de l’inclusivité en entreprise, en raison de son jeune âge, il rappelle l’évidence : « l’essentiel, c’est que la hiérarchie puisse traiter tout le monde sur le même plan, pour que chacun·e ait les mêmes chances d’accès au poste sous réserve de compétences. Je ne peux pas m’épancher sur les détails vu mon niveau d’expérience mais je peux dire que les ressources humaines se devraient d’être, partout, vraiment humaines. Ça veut dire qu’elles doivent voir leurs employé·es comme des personnes passionnées plutôt que comme des quotas ou des chiffres ». Pour lui, c’est certain, « ce genre de politique règlerait un nombre de problèmes hallucinant ».