De plus en plus d’associations étudiantes LGBTQ+ commencent à s’intéresser au sujet du bien-être de leurs étudiant.e.s dans le monde pro. Comment ces associations s’organisent pour inciter les entreprises à rendre leur management LGBT-friendly ?
Par Léa Taïeb
Aujourd’hui, plusieurs associations se mobilisent pour faire évoluer les conditions de travail des étudiant.e.s LGBTQ+ et garantir leur épanouissement professionnel. “Avec la crise du covid-19 et les industries à l’arrêt, on a réalisé qu’on avait un rôle à jouer dans la recherche de stages ou d’alternances des étudiant.e.s LGBTQ+”, explique Claire, membre du tout nouveau pôle corporate du Caélif (collectif des associations LGBTQ+ d’Île-de-France). Et de poursuivre : “dans le même temps, de plus en plus d’entreprises françaises se sont mises à communiquer sur leur politique en faveur de l’inclusion des personnes de la communauté”.
Agir en partenariat avec des entreprises qui s’engagent
Le collectif Caélif met en relation les étudiant.e.s à la recherche d’une expérience professionnelle avec les entreprises engagées sur les questions d’identités de genre et d’orientations sexuelles. Depuis plus d’un an, le collectif construit un réseau d’entreprises en phase avec les attentes des nouvelles générations. “On s’assure aussi que leurs engagements sont sincères, qu’elles ne pratiquent pas de pinkwashing”, complète Claire.
ESCAPE, l’association LGBTQ+ de l’école de commerce l’ESCP organise chaque année les LGBT Talents, le plus gros forum de recrutement LGBT en France. “Des entreprises comme EY ou BCG sont présentes et organisent des workshops pour prouver leurs actions en faveur de l’inclusion”, décrit la secrétaire générale de l’association. ESCAPE est également soutenue financièrement par EY, “ce qui en dit long sur son engagement”, ajoute l’étudiante.
Sans surprise, les entreprises de la Tech venues de la Silicon Valley sont nombreuses à montrer l’exemple. Le géant Google organise des ateliers “relecture de CV” pour les membres du Caélif. “Ce sont surtout les actions concrètes qui plaisent aux étudiant.e.s. Les entreprises ne peuvent plus simplement faire un discours pour convaincre, elles doivent aller plus loin”, remarque l’étudiante membre du pôle corporate du Caélif.
L’Autre Cercle, bientôt partenaire des étudiant.e.s ?
Le Caélif collabore avec l’Autre Cercle, association qui agit pour l’insertion professionnelle des personnes de la communauté LGBTQ+. En ce moment, l’association discute avec de nombreux établissements d’enseignement supérieur pour qu’ils signent une déclinaison de leur Charte LGBT+ incitant les professeur.e.s, l’administration et les étudiant.e.s à évoluer sur le terrain de l’inclusion. “Mais, la charte ne réglemente pas les relations entre une école et une de ses entreprises partenaires qui ne se positionne pas sur le sujet LGBTQ+. Simplement, on conseille aux établissements de concevoir leur classement des entreprises les plus appréciées par les étudiant.e.s en prenant en compte leur engagement LGBTQ+”, précise Catherine Tripon, porte-parole de l’Autre Cercle et co-animatrice de la Charte.
Gagner en influence
Les associations étudiantes peuvent-elles avoir un impact sur les pratiques managériales des entreprises ? C’est déjà le cas, dans des secteurs hautement concurrentiels comme la tech. Pour répondre aux exigences de nouvelles générations et pouvoir recruter de nouveaux talents, les responsables RH s’ouvrent à la diversité et à l’inclusion. En 2019, 80% des millenials déclaraient que la politique de l’employeur en matière de diversité, d’égalité et d’inclusion jouait dans le choix d’un nouveau job (d’après l’étude PwC « Out to Succeed : Realising the full potential of your LGBT talent »). “Même si les entreprises ont réalisé que le rapport de force était inversé, elles peinent à mettre en confiance leurs nouvelles recrues LGBTQ+. Il y a encore trop peu de “rôles modèles premier emploi”, confirme Catherine Tripon.
Comment faire bouger les lignes ? “Tant que les associations ne seront pas présentes dans les instances de gouvernance de leurs établissements, elles ne pourront pas faire pression sur les employeurs non inclusifs”, estime la porte-parole de l’Autre Cercle. Ensemble, établissements et associations doivent travailler avec les entreprises qui bougent et “former” celles qui n’ont pas encore compris l’impact d’une politique LGBT-friendly.